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samedi 25 décembre 2010

Kyokun - Karate jutsu ni sente nashi - 1

"Il n'y a pas de première attaque en karate jutsu."

Les vingt karate jutsu niju kyokun
Maître Roland Habersetzer, dans son encyclopédie des arts martiaux, donne les éléments de définition et de première interprétation de ce kyokun :
"Deuxième des vingt règles de Funakoshi Gichin, l'une des plus célèbres, gravée sur la pierre de son mémorial élevé au temple Enkakuji de Kamakura. "Il n'y a pas de premier mouvement (attaque) en karate". Cette sentence (Kaisetsu) résume toute l'attitude qui doit être à la base de la pratique du karate, comme des arts martiaux (Budo) en général."

Maître Funakoshi Gichin insiste sur cette notion dans son livre Karate-do Ma Voie Ma Vie :
"J'ai toujours insisté, dans mon enseignement, sur le caractère essentiellement défensif du karate. On ne doit jamais l'utiliser à des fins offensives. "Faites attention à vos paroles", ai-je écrit dans un de mes premiers livres, "car si vous êtes vantard, vous vous créerez un grand nombre d'ennemis. N'oubliez jamais le vieux dicton selon lequel une forte bourrasque peut déraciner un gros arbre tandis que le saule plie et laisse passer l'assaut du vent. Les vertus cardinales du karate sont prudence et humilité". Voilà pourquoi j'enseigne à mes élèves de toujours être en alerte mais jamais agressifs. (...) Quelques uns des plus jeunes, je dois le dire, ne comprennent pas mon attitude : ils sont persuadés que le karate doit être employé quand les circonstances l'exigent. J'essaie de leur faire remarquer que c'est là mépriser totalement le vrai sens du karate. Ce n'est pas un simple jeu. Il nous fait courir un danger mortel. Pouvons-nous nous permettre de risquer sans réfléchir une vie déjà si courte ?"

Les précisions du Maître démontrent que ce kyokun est loin d'être un précepte pacifiste, mais qu'il doit se comprendre dans un sens de recherche d'efficacité ("toujours être en alerte"), dans un contexte qui n'est pas celui du karate-sport ("ce n'est pas un simple jeu"), mais bien celui de la préservation de la vie.
On retrouve cette notion de préservation de la vie, sans pacifisme, dans Le Livre des Traditions Familiales de Yagyû Munenori (1571 - 1646), maître d'armes du shogun, qui commence par la citation d'un dicton inspiré du Tao-Te Ching : "Selon un ancien dicton, "les armes sont des instruments maléfiques, que méprise la Voie de la nature : d'après la Voie de la nature, on ne doit en user que quand on ne peut l'éviter". (...) Pourquoi les armes sont-elles des instruments maléfiques ? Parce que la Voie de la nature est le Tao, qui donne la vie aux êtres; par conséquent, un instrument qui sert à tuer ne peut être que maléfique."

Aucun idéalisme pacifiste en effet lorsqu'on lit la suite :
"Toutefois, il est dit aussi que l'usage des armes pour tuer - du moins quand c'est inévitable - fait aussi partie de la Voie de la nature. Qu'est-ce que cela veut dire ? Les fleurs s'épanouissent et la verdure prolifère quand souffle la brise printanière; mais à l'apparition des gelées d'automne, invariablement, les feuilles tombent et les arbres s'étiolent. C'est la loi de la nature. Il peut donc se présenter un moment où il faut abattre ce qui doit l'être. Certains profitent des évènements pour commettre le mal. Quand le mal se manifeste, il faut le combattre. C'est pourquoi il est dit que l'emploi des armes fait aussi partie de la Voie de la nature."

L'Ame du Samouraï de Thomas Cleary : une traduction contemporaine de trois classiques du Zen et du Bushido, dont Le Livre des Traditions Familiales de Yagyû Munenori.


dimanche 17 octobre 2010

Essence des kata et mystification

"En théorie, les kata devraient être le reflet exact, inchangé, dans les moindres détails, de kata millénaires. C'est le cas dans certaines écoles chinoises (Kung-Fu). Il n'en est rien dans les écoles japonaises. Le Maître Gichin Funakoshi était un merveilleux pédagogue, ce qui fit sa réputation plus que ses qualités de karateka (...). C'est en tant que tel qu'il créa les Pinan, en fractionnant le Kushanku (qui devint Kanku) et le Bassai, puis les Eian, ce qui créa la division entre le Shoto et le Wado. Plus près de nous encore ce furent son fils Maître Yoshitaka Funakoshi et son ami Egami, tous deux de véritables génies du karate, qui créèrent les deux premiers Taikyoku dans un nouveau but de simplification dans les clubs universitaires... et pour une recherche plus profonde. Tous les katas actuels dans tous les styles japonais sont récents ou modifés. Je possède plusieurs livres du temps de Me Gichin Funakoshi qui se contredisent et contredisent les kata tels que les montrent les instructeurs japonais les plus réputés actuellement. Et il arrive très souvent que ces derniers modifient par eux-mêmes certaines portions de kata.
Il faut donc s'attacher bien plus à l'esprit du ou des kata que de tomber dans le dogme ou d'ergoter sur tel ou tel détail d'une école ou d'un "Maître"."
Extrait de la préface écrite par Maître Henry Plée à l'ouvrage "karate-do katas de base et avancés" de Roland Habersetzer paru en 1980, puis reprise dans son ouvrage "Shotokan kata" édition 1992.

Tel ou tel détail d'une école ou d'un "Maître". Pourquoi Maître Henry Plée utilise-t-il les guillemets pour le mot Maître ? L'histoire suivante, citée dans l'ouvrage de Harry Cook "La Grande Histoire du Shotokan", en donne peut-être une clé. L'auteur cite Gichin Funakoshi dans Karate-do Nyûmon :
"La coutume qui voulait que l'enseignement demeure secret perdura à Okinawa jusqu'à ces dernières années. Il y a environ dix ans, je reçus une lettre d'un vieil homme qui me disait : "je connais un kata que je n'ai jamais enseigné à quiconque, et je souhaite vous le transmettre avant de mourir". Je fus profondément touché de son attention, mais malheureusement il ne m'était pas facile alors de faire le voyage jusqu'à Okinawa. (...) Néanmoins, mon fils Gigo devait se rendre à Okinawa et je demandai au vieil homme de lui enseigner le kata à ma place.
Le vieil homme fut transporté par la venue de Gigo. Et lorsque fut venu le moment de lui enseigner le kata, il boucla soigneusement portes et fenêtres afin que personne ne puisse voir à l'intérieur de la maison. Lorsqu'il eut terminé, le vieil homme déclara : "Maintenant je peux mourir en paix. Parmi les hommes auxquels j'ai refusé d'enseigner le kata, il en est un qui n'a cessé de me harceler jusqu'à ce que j'accepte de le faire. Mais j'en ai altéré la forme et les mouvements importants. Aussi, si le moindre doute se fait jour dans l'avenir quant à l'authenticité de ce kata, dites à votre père que le kata que je vous ai enseigné est le bon."."

samedi 2 octobre 2010

Kihon martial

Le kihon est connu dans beaucoup de dojos comme le travail des techniques de base - défenses, attaques et déplacements - comparable à celui des gammes pour les musiciens.
Il est, généralement, pratiqué sans partenaire, et en avançant, sous la direction du senseï ou d'un senpaï scandant le signal, cette synchronisation apportant à chacun l'énergie du groupe pour répéter la technique.
Gabrielle et Roland Habersetzer, dans leur Encyclopédie des arts martiaux de l'extrême Orient (technique, historique, biographique et culturelle), donnent une définition du kihon qui élargit la perspective tout en précisant que le sens généralement admis est restreint :
Kihon : L'énergie (Ki) de base (Hon) : pour désigner les formes d'entraînement aux techniques de base d'un art martial (budo) avec une utilisation optimale de l'énergie interne (Ki). Au sens général ; répétition des techniques de base, entraînement fondamental, en général dans le vide, sans partenaire."
Maître Henry Plée, lors de l'un de ses séminaires de démystification martiale, montre des faces cachées du kihon :
"Un kihon correct doit se faire aussi bien en avançant qu'en reculant et également sous les formes yang et yin".
"Le kihon martial doit toujours être fait à deux, cela permet, entre autres, de travailler sur le psychisme de l'adversaire."